Les Pièges de Chronos ou : Quelques considérations sur les maquettes uchroniques et en particulier la « Luftwaffe 1946 »
L'idée de cet article est de vous aider à éviter les pièges des maquettes uchroniques comme celles dites « Luftwaffe 46 » (il y a aussi « Hikoki 1946 » pour les avions japonais). Mais d'abord quelques définitions :
Une uchronie est un monde parallèle qui « a ses propres fondements historiques et diverge de celui [que nous connaissons] à partir d'une altération plus ou moins éloignée dans le passé , nommée élément fondateur » ( Eric Henriet « l'histoire revisitée » éditions Encrage 1999). Dans le cadre du présent article les maquettes que je qualifie « d'uchroniques » sont celles qui, tout en étant basées sur des éléments historiques -par exemple des plans ou des brevets-, représentent des objets qui dans « notre » histoire n'ont pas existé en tant que tels.
Elles se distinguent donc des créations purement de science-fiction comme celles de mes collègues du SIG « What-if » d'IPMS-UK qui représentent des avions d'un conflit entre l'empire Romain et l'empire Aztèque (qu'il s'agisse d'avions « réels » est alors purement incident) ou de créations pures comme l'Aile Volante nazie des « Aventuriers de l'Arche perdue ».
Les maquettes qui font l'objet du présent article représentent des véhicules réels mais qui n'ont pas été construits dans « notre » Histoire . Elles se veulent donc une spéculation sur « ce qui aurait pu être ».
Un bel exemple de maquettes uchroniques vues au Scale Model World 2002 (IPMS UK Nationals) : si le TSR 2 était entré en service durant les années 60 il aurait pu porter un camouflage standard (centre), et sur la fin de sa carrière, un camouflage « Desert Storm » (à droite) et même servir de banc d'essais au RAE Farborough (à gauche)
A l'inverse cette maquette d'un Blohm & Voss « symétrique » vue lors de la même exposition est une pure création du maquettiste qui ne peut entrer dans notre sujet.
En guise de conclusion : entre l'uchronie , spéculation historique sur « ce qui aurait pu être » partant de faits réels et la fiction pure il y a une frontière ténue qu'il est facile de franchir. A contrario, une maquette uchronique qui se veut uniquement « spéculative » et non « fictionnelle » est parfois plus difficile à réaliser qu'une maquette d'un véhicule historiquement construit car la recherche documentaire ne peut plus se limiter à un objet en particulier mais doit inclure tout son contexte économico-industriel (voir stratégique pour les engins militaires). Par contre l'uchronie maquettiste se distingue nettement des uchronies de wargames et de jeux de simulation en ce qu'elle n'est pas tant intéressée par les conséquences de l'introduction d'une technologie non-historique que par les conditions de son introduction : par exemple là où les stratèges peuvent se demander quel aurait été l'impact de l'introduction du moteur à vapeur dans la légion Romaine, le maquettiste devra se demander pour quelle Rome une trirème (mais s'appellera-t-elle encore trirème ?) à vapeur serait-elle construite : impériale ou républicaine ? utiliserait-on la propulsion à vapeur pour les combats ou resterait-on à la rame (dans l'antiquité les mats et les voiles étaient déposés sur la plage pour ne pas être endommagés durant le combat durant lesquels seule la force des rameurs était utilisée pour manœuvrer) ? quels dieux pouvant apparaître en figure de proue seraient-ils à l'honneur ? brûlerait-on du bois ou du charbon dans la chaudière ? et même serait-ce Rome ou Athènes qui développerait la première les « steamers » ? (Jacques Martin dans « Alix » a tranché : ce sont les Atlantes qui ont des navires à vapeur !
Voilà cet article n'avait d'autre but que de vous donner quelques pistes de réflexion pour vos futurs (passés?) modèles…amusez-vous bien !
Remerciements à Eric Henriet, Mat Irvine et Eric Penot pour leur participation à ces travaux.